Qui aime aller lire les textes de lois ? Très franchement, pas moi ! Hélas, c’est pourtant un passage obligé avant de publier une application, pour être conforme à la législation.
Dans le domaine de l’accessibilité des applications mobiles, la tâche semble encore plus difficile : en France, ce sont pas moins de sept textes différents pour décrire toutes les exigences ! Sans compter les textes européens… Et la plupart des articles de vulgarisation se limitant aux sites web, il devient compliqué de s’y retrouver !
Pour démêler tout ça, je vous propose donc un petit tour complet des lois en France pour l’accessibilité des applications mobiles ! Pour faciliter la lecture, les liens vers les textes de lois seront indiqués en fin d’article.
Pour savoir si votre application est concernée par l’obligation, il y a en fait deux cas à distinguer.
D’abord, toutes vos applications sont concernées si vous êtes :
Si vous êtes dans un de ces cas, alors vous êtes déjà soumis à l’obligation d’accessibilité depuis 2005 (ou 2019 dans le cas des entreprises privées).
À noter que les applications internes à une entreprise (intranet, extranet…) sont aussi concernées (cf. le Rappel du champ d’application de la DINUM).
Pour les autres applications, il n’y a aucune obligation d’accessibilité aujourd’hui. Cependant, de nouvelles règles s’appliqueront à partir du 28 juin 2025 pour les produits et services, suite à l’Accessibility Act. Les applications concernées seront [VII] :
À noter que les applications publiées avant le 28 juin 2025 auront jusqu’au 28 juin 2030 pour se mettre en conformité [V]. De plus, les petites entreprises employant moins de 10 personnes et avec un chiffre d’affaires inférieur à 2 millions d’euros seront aussi exemptées de ces obligations [VI].
Une application est considérée comme accessible (au sens légal) si elle respecte tous les critères de la norme européenne EN 301-549 V3.2.1. Attention, n’ouvrez pas ce lien tout de suite ! Le document fait 186 pages, alors gardez ça dans un coin en dernier recours 😉.
Pour vérifier si une application respecte cette norme, le plus simple est d’utiliser le Référentiel d'évaluation de l'Accessibilité des Applications Mobiles (RAAM), édité par le gouvernement du Luxembourg. Il propose une liste de 107 critères de contrôle pour vérifier si votre application est conforme, avec une méthode de test pour chaque critère !
Pour les plus curieux, le RAAM est directement inspiré du RGAA, son équivalent pour les sites web édité par la DINUM. À savoir aussi que la norme européenne est une transcription du WCAG, correspondant au niveau AA.
Pour les organismes (publics ou privés) déjà concernés par l’obligation d’accessibilité, des obligations déclaratives s’ajoutent pour prouver la bonne foi de l’organisme. Chaque application doit alors contenir :
Pour les applications soumises à l’obligation d’accessibilité en tant que services (donc celles concernées à partir de 2025), les contraintes sont légèrement différentes. D’abord, en plus de l’obligation d’accessibilité, l’application doit remplir des obligations spécifiques propres au type de service [X], notamment :
L’application doit aussi fournir une documentation technique, expliquant comment le service satisfait les exigences d’accessibilité [VIII]. Encore une fois, cette documentation pourra s’appuyer sur le RAAM.
Dans le cas des applications considérées comme des services (à partir de 2025), le manquement à une des obligations est sanctionné par une contravention de 5ᵉ classe (soit jusqu’à 7 500 € pour une entreprise).
Pour les organismes publics et les grandes entreprises, l’ARCOM peut prononcer une sanction de 20 000 € en cas de manquement aux obligations déclaratives [IV] (déclaration d’accessibilité, schéma pluriannuel, ou mention de l’état de conformité). Un délai de 3 mois leur est toutefois accordé avant de prononcer la sanction, afin de se mettre en conformité.
À noter que cette dernière sanction est ramenée à 2 000 € pour les communes ou groupement de communes de moins de 5 000 habitants.
Tous les produits numériques sont concernés par ces lois, que ce soient des sites web, des applications pour TV, des bornes de paiement, des livres audio, etc.
La différence principale sera surtout au niveau de la méthode technique d’évaluation : si on a le RGAA pour les sites web et le RAAM pour les applications mobiles, il n’existe pas d’équivalent pour les autres produits et il faudra donc se reporter directement à la norme européenne (ou au WCAG).
Dans le cadre d’un logiciel ou d’une application, les obligations se limiteront aussi aux capacités techniques du système d’exploitation hôte.
Ça y est, vous êtes un expert sur les lois en accessibilité ! Enfin presque, cet article a uniquement un objectif de vulgarisation, et n’a pas pour but de remplacer une véritable expertise juridique 😁
Si vous souhaitez explorer encore plus l’accessibilité numérique, n’hésitez pas à aller lire ou relire cet article pour améliorer le design de votre app, ou encore celui-ci pour faire des applications accessibles avec React Native !
[VI] : Article L412-13 - Code de la consommation